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Des nouvelles du Réseau : Boris SPASSKY (BPREA 2022) - GreenPods, futur poids lourd de l’agriculture régénératrice ?

03 avril 2023 ACTESA
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L’entreprise ambitionne de convertir 2.000 hectares de terres agricoles abîmées par les pratiques intensives. Elle teste son modèle sur une première ferme pilote.

Source : Les Echos

Par Pierre Fortin

Publié le 27 déc. 2022 à 10:34

Le domaine agricole de la Granja, près de Toulouse, s’étend sur plus de 170 hectares. Encore récemment, il aurait pu être érigé en symbole de l’agriculture intensive, avec ses champs uniquement dédiés à la culture du maïs destiné à engraisser les porcs de l’autre côté des Pyrénées. Mais fini le modèle des temps agricoles anciens, l’exploitation pourrait désormais préfigurer, grâce à GreenPods, l’agriculture du futur.

Boris Spassky (Alumni BPREA 2022) et Martin d’Archimbaud se rencontrent au sein du fonds d’investissement à impact Mirova. Forts de l’expérience accumulée grâce à diverses fonctions occupées au sein de l’industrie agroalimentaire, tous deux souhaitent désormais mettre directement les mains à la terre. «Nous nous sommes intéressés aux marchés des fruits à coques, qui présentent une réelle aberration économique, expose Martin d’Archimbaud. Par exemple, l’Europe est le premier consommateur mondial d’amandes, mais 80 % des fruits sont produits aux Etats-Unis.»

L’enjeu est donc de relocaliser la filière en Europe, tout en s’éloignant du modèle intensif américain, dévastateur pour l’environnement. Les deux entrepreneurs veulent mettre en place les techniques de l’agriculture régénératrice, qui améliorent la santé, la fertilité et le stockage de carbone des sols. Boris Spassky et Martin d’Archimbaud fondent GreenPods en 2020 et acquièrent, grâce à l’appui financier de la Maïf qui achète le foncier, le domaine de la Granja.

Rotation des cultures

L’agriculture régénératrice s’appuie sur plusieurs principes : réduire l’usage des intrants chimiques et du labour, augmenter les couverts végétaux et diversifier les cultures. Au domaine de la Granja, GreenPods compte planter 64 hectares d’amandiers, soit près de 30.000 arbres, dont la moitié a été mise en terre en février 2022. Afin de régénérer le sol, une culture de couverture sera mise en place entre les rangées d’arbres.

«Les sols de l’exploitation étaient hétérogènes et pas tous adaptés à la culture de l’amandier», fait savoir Martin d’Archimbaud. Ainsi, le reste du domaine fait l’objet d’une rotation des cultures comprenant notamment du soja, du sarrasin, du tournesol, de l’épeautre, de l’avoine et du blé d’hiver. Cette rotation permet notamment d’éviter les maladies et de réduire la pression des adventices – les « mauvaises herbes » du jardinier amateur.

Boris Spassky et Martin d’Archimbaud fondateurs de Greenpods. Crédit photo DR

Enfin, plus de 4.000 mètres de haies seront plantées dans et autour de l’exploitation. Ces installations végétales permettent de mieux structurer les sols, d’améliorer la rétention d’eau et la séquestration de carbone, ainsi que de favoriser la biodiversité, à même de rendre de grands services à l’exploitation.

Un laboratoire à ciel ouvert

Au total et hors prix des terres, GreenPods compte investir 3,5 millions d’euros sur six ans. La société a effectué une première levée de fonds d’un million d’euros auprès de business angels (Michel de Rovira, cofondateur de Michel & Augustin, Christine Kolb et Laurent Deltour, cofondateurs de Sycomore AM, ou encore Julia Perroux et Didier Kuhn de 50 Partners) et compte sur 1,1 million d’euros de dette bancaire avec le concours du Fonds européen d’investissement et du mécanisme de garantie de l’Initiative nationale pour l’agriculture française (INAF). A partir de 2025, l’exploitation de la Granja devrait produire environ 100 tonnes d’amandes par an – soit environ 1,5 tonne par hectare, quand les exploitations intensives en Californie en produisent 3 tonnes sur la même surface.

« Nous n’avons pas réinventé la roue et nous ne développons aucune technologie propre, prévient Boris Spassky, mais nous avons deux objectifs importants : rationaliser les coûts de production pour être compétitifs et atteindre l’excellence environnementale.» Pour ce faire, GreenPods teste sur son domaine agricole un véritable arsenal de technologies de pointe : irrigation au goutte-à-goutte, sondes météo, sondes capacitives mesurant l’humidité à plusieurs niveaux de profondeur dans le sol, imagerie satellite ou encore essais de petits robots pour maintenir l’herbe à un niveau raisonnable.

L’exploitation va également tester l’agrivoltaisme, en partenariat avec Akuo, en installant des panneaux solaires sur une vingtaine d’hectares. «Cela mobilise entre 10 et 15 % de la surface agricole utile, explique Martin d’Archimbaud, mais, outre la production d’énergie, il y a de nombreux avantages comme l’atténuation des vents violents et la protection contre la grêle. » Les panneaux seront espacés de onze mètres, de manière à laisser passer les machines, et cohabiteront avec une culture de céréales protéagineuses.

GreenPods teste sur son domaine agricole un véritable arsenal de technologies de pointe : irrigation au goutte-à-goutte, sondes météo ... Crédit photo DR

Ce déploiement technologique est aussi une manière d’anticiper les contraintes propres à la transition vers une exploitation bio et régénératrice. «L’agriculture biologique présente un surcoût dû à l’augmentation du besoin en main-d’œuvre et en machine, reconnaît Boris Spassky. Mais l’approche holistique de l’agriculture régénératrice peut atténuer ce surcoût, en utilisant l’ensemble des ressources à disposition, comme la biodiversité, pour lutter naturellement contre les nuisibles et en améliorant la qualité du sol. » Malgré ces contraintes, GreenPods prévoit un taux de rentabilité interne de 7 à 9 % chaque année.

4.575 tonnes de CO2 captées

L’entreprise a calculé que, sur la durée de vie du verger, estimée à vingt-cinq ans, l’exploitation de la Granja captera 4.575 tonnes de CO2, soit 1.830 allers-retours Paris-New York. Un bilan d’émission négatif qui lui permettra de vendre des crédits carbone. Depuis son lancement, le domaine collectionne ainsi les certifications et les records. Labellisé bio, il est le premier à avoir obtenu en France la certification Regenagri de Control Union et il est le plus grand verger à se voir décerner le Label Bas Carbone par le ministère de la Transition écologique.

 
 
GreenPods assume ainsi de grandes ambitions. D’ici deux à trois ans, elle vise l’exploitation en agriculture régénératrice de 2.000 hectares entre la France et l’Espagne – soit 600.000 à 700.000 arbres productifs plantés. Elle lorgne d’ores et déjà sur une nouvelle exploitation de 500 hectares située de l’autre côté des Pyrénées.

«L’objectif est d’atteindre une certaine masse critique pour parler directement aux détaillants et aux distributeurs, sans avoir à passer par les grandes centrales d’achat, révèle Boris Spassky. Nous voulons vendre des produits traçables, en circuit court.»

S’attaquant à une nouvelle levée de fonds, l’entrepreneur promet qu’«en période d’inflation, la terre agricole est une valeur sûre. Depuis des décennies, elle s’apprécie en moyenne de 3 % par an.» De quoi régénérer, outre les sols agricoles, le portefeuille de ses futurs investisseurs cherchant des performances régulières à long terme.




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